2012/Dans le coeur, la dimension affective de la grève de 2012

Le film documentaire revient sur la plus grande grève étudiante du Québec, une décennie plus tard.

De février à septembre 2012, le « printemps érable », ce moment historique, a rassemblé des centaines de milliers d’étudiant·es manifestant dans les rues de la province. Plus de dix ans plus tard, le duo de réalisateurs composé de Rodrigue Jean et d’Arnaud Valade présente 2012/Dans le coeur, un film documentaire fait d’archives amateures et professionnelles au cœur des moments forts des mobilisations étudiantes et citoyennes.

Les soubresauts de la caméra nerveuse et désorientée parlent d’eux-mêmes. La mise au point se perd parfois, laissant les spectateur·trices désorienté·es devant l’image floue et illisible. Les sons ambiants fluctuent. On passe de bombes assourdissantes qui explosent à des gens qui scandent des slogans, qui crient, une troupe qui hurle, des personnes qui insultent, qui pleurent, qui chantent…

Ces images, ce sont celles de nombreuses personnes qui ont filmé les différentes manifestations au cœur des mobilisations de la grève étudiante de 2012 et que les réalisateurs se sont attelés à décortiquer pour leur documentaire.

Ce long processus a exigé de scruter et sélectionner des témoignages vidéo étalés sur plusieurs mois. « C’était beaucoup beaucoup de visionnement de sources différentes. On a fini par faire une sélection. […] On avait énormément de clips de cinq secondes », avoue Arnaud Valade, co-réalisateur.

Il souligne aussi que le groupe d’action en cinéma Épopée et son projet Insurgence, paru en 2013, ont aussi contribué aux images. 

Une voix narrative accompagne avec parcimonie le documentaire qui totalise quelque 77 minutes. Interprétée par Safia Nolin, cette narration calme et posée récite un texte de réflexion critique qui flirte avec des airs de poésie.

S’inscrire « dans le mouvement »

Le documentaire s’articule autour de multiples manifestations, mais avec un focus particulier sur celles survenues lors de la présentation du Plan Nord par Jean Charest au Palais des congrès de Montréal et lors du congrès du parti Libéral à Victoriaville. 

« On trouvait que ces événements résumaient bien la dimension affective de ce que c’était d’être dans la rue », explique Arnaud Valade. « Ce sont les moments où il y a le plus d’intensité. »

« Pour nous, c’est un point de basculement où la grève s’est dépassée elle-même. […] Ça n’avait plus à voir strictement avec les enjeux économiques et libéraux. Là, [dans le cas du Plan Nord] on s’attaquait plus à la structure même de l’État québécois et sa vocation néocoloniale », ajoute le co-réalisateur.

« Le film s’inscrit dans le mouvement, au sens où on essaie de l’actualiser et de voir qu’est-ce que ça a voulu dire et qu’est-ce que ça veut dire pour la suite… Qu’est-ce que ça veut dire aujourd’hui? »

Arnaud Valade, co-réalisateur

Lors de ces manifestations, la montée des violences et de la colère est palpable. La foule de manifestant·es, alors constituée d’une diversité de citoyen·nes, est confrontée à un corps policier armé de matraques, balles de caoutchouc, gaz lacrymogènes, de grenades assourdissantes…

À Victoriaville, un manifestant a d’ailleurs perdu un œil après avoir été atteint à la tête par un projectile. Il s’agit de Maxence Valade, le frère d’Arnaud.

Voilà dans quoi nous plonge le documentaire : dans une expérience immersive. « Ce sont des expériences vraiment intenses. [Il y a] des gens qui, du jour au lendemain, font une expérience de la violence et de la confrontation avec la police, alors que c’est le quotidien de plusieurs personnes issues de groupes marginalisés. Ça a été un déclic dans la tête de beaucoup de monde », affirme Arnaud. 

Présenté en première au Festival du nouveau cinéma (FNC) en 2022, 2012/Dans le cœur a remporté le prix du public. Le film sera disponible en salle au Québec dès le 31 mars.

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