Les femmes syndiquées contre la violence conjugale

Les syndicats multiplient les initiatives de prévention et de soutien contre la violence conjugale.
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Au Québec, le mouvement syndical a été à l’avant-garde de nombreuses luttes sociales, pour l’équité salariale et pour les politiques anti-harcèlement et antidiscrimination. Au cours des dernières années, les grands syndicats québécois ont tourné leur attention vers la prévention de la violence conjugale.

Il y aurait environ 1,7 million de travailleurs et travailleuses syndiqué·es au Québec. Nancy Patry rêve de voir 1,7 million de voix qui se lèvent contre la violence conjugale.

Nancy Patry est directrice de la maison Hina, un refuge pour femmes ayant vécu de la violence conjugale à Saint-Jean-sur-Richelieu. Au cours de la dernière année, la maison a élargi son offre de services pour donner des formations en prévention aux employé·es syndiqué·es de la municipalité.

Le 21 mars dernier, elle participait à un colloque réunissant des représentant·es et délégué·es syndicales ainsi que des intervenant·es en violence conjugale des quatre coins du Québec, réuni·es pour discuter du rôle des syndicats et des milieux de travail dans la prévention de la violence.

Le colloque était organisé par le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale en collaboration avec plusieurs grands syndicats et employeurs, dans le cadre de la campagne « Milieux de travail alliés contre la violence conjugale ».

« La violence conjugale est un enjeu de société qui a la possibilité de désorganiser tout un milieu de travail », observe Isabelle Renaud, conseillère syndicale responsable de l’éducation à l’Alliance de la fonction publique du Canada-Québec.

Ce que peuvent les syndicats

Les présentatrices ont détaillé trois façons dont les syndicats peuvent soutenir les personnes vivant de la violence conjugale. Il existe par exemple des clauses dans les conventions collectives qui accordent des congés payés aux survivantes et établissent des plans de sécurité.

Les syndicats peuvent aussi soutenir la formation de pairs aidant·es, qui deviennent habilité·es à écouter les victimes et à offrir des références.

Enfin, les syndicats mettent déjà sur pied des programmes de sensibilisation visant l’ensemble des employé·es d’une entreprise, comme celui de la maison Hina.

De plus, les panélistes ont noté que depuis 2021, les employeurs doivent légalement prendre des mesures pour protéger tout·e employé·e vivant une situation de violence, dès qu’ils sont mis au courant de la situation. Les formations en prévention sont également subventionnées par la CNESST.

Six choses à faire pour devenir allié·e des survivant·es en milieu de travail

*S’informer sur la violence conjugale, par exemple avec ce guide d’information de la CSN.

*Reconnaitre les signes d’une relation toxique ou contrôlante : si votre collègue semble toujours sur ses gardes, si vous recevez des visites ou des appels fréquents de son conjoint à son lieu de travail ou si elle est plus souvent absente, en retard ou dans l’incapacité de respecter les délais, il s’agit des signes d’un problème potentiel.

*Rassurer votre collègue que vous êtes là pour l’écouter, mais en lui donnant l’espace pour prendre ses propres décisions en temps et lieu.

*Se renseigner sur les ressources locales en matière de violence conjugale.

*Incorporer des messages sur la prévention de la violence conjugale et sur les ressources disponibles dans vos communications internes.

*Planifier et accommoder : si une survivante doit communiquer avec un·e médecin, un·e avocat·e, un·e intervenant·e, SOS Violence conjugale ou la police pendant ses heures de travail, assurez-vous qu’elle peut le faire sans conséquences professionnelles.

*Accompagner et être présent·e en cas d’urgence : assurez votre collègue que vous serez là pour l’accompagner dans une maison d’hébergement si elle le souhaite.

Un besoin qui se fait sentir

Isabelle Renaud note que la pandémie, l’isolement occasionné par le télétravail et la vague de féminicides de 2020 et 2021 ont augmenté d’insécurité des femmes vivant dans des situations violentes, en plus de focaliser l’attention médiatique sur la violence conjugale.

« Toutes les questions de prévention et de soutien [des victimes] sont importantes non seulement dans la vie syndicale, mais dans la vie en société en général. »

Isabelle Renaud, AFPC-Québec

Dans ce contexte, rapporte-t-elle, les syndicats ont revendiqué plus de formation sur la prévention, ce qui a mené à une série de webinaires et de formations en personne.

Évolution des mentalités

Selon Isabelle Renaud, chaque formation et chaque clause de convention collective représente une victoire après des décennies d’efforts par des comités féministes syndicaux. Il n’y a pas si longtemps, rappelle-t-elle, beaucoup de syndicalistes voyaient la violence conjugale comme un enjeu privé.

De son côté, Nancy Patry observe une évolution encourageante des mentalités. Elle note que tou·tes les employé·es de la municipalité de Saint-Jean-sur-Richelieu, plus de 700 personnes, suivent désormais une formation sur la violence faite aux femmes – une initiative de la direction de ressources humaines qui a été adoptée avec enthousiasme par le conseil municipal. De plus, environ 80 personnes ont choisi de recevoir une formation plus poussée pour devenir personnes-ressources.

Les intervenantes de la maison Hina souhaitent embaucher plus de personnel pour bonifier le programme de formation, et d’autres maisons de la région adoptent des initiatives similaires.

Comme elles, Isabelle Renaud rêve de voir les initiatives de prévention implantées dans tous les syndicats du Québec. « Toutes les questions de prévention et de soutien [des victimes] sont importantes non seulement dans la vie syndicale, mais dans la vie en société en général. »

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